Un exemple canadien sur l'accompagnement des proches

Après le décès, à quel point est-il important que le médecin de famille reste en contact avec la famille du patient ou de la patiente?
Document canadien sur l’accompagnent des proches après la mort d’un patient en soins palliatifs
Le rôle d’attention du médecin envers les membres de la famille fait partie intégrante des soins au patient et se poursuit depuis le diagnostic, pendant la trajectoire de la maladie, le traitement et les soins de fin de vie, jusque dans le deuil. Comprendre le processus de deuil des membres de la famille, et ce qui peut les aider est aussi important. Pendant la maladie, le médecin joue un rôle clé pour aiguiller le patient et sa famille vers les services appropriés tels que les soins à domicile et les soins palliatifs en établissement. Ces soins palliatifs, le moment venu, veillent à la prise en charge des symptômes et proposent du soutien émotionnel et spirituel au malade en phase terminale et à sa famille en pré-deuil. Durant cette période de soins et de deuil anticipé, la famille reçoit le soutien nécessaire et noue des liens qui persistent après le décès du malade
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Deuil suite à une longue maladie

Quand une longue et souffrante maladie affecte l'un de nos proches, ou nous-même, l'impuissance peut envahir nos vies. Comment envisager l'avenir sereinement, quand jour après jour on perd un peu plus d'énergie? Si nous devons nous préparer difficilement à perdre un être que l'on aime, il ne faut surtout pas oublier que pour la personne qui meure doucement, c'est toute une série de deuils à affronter...
Citation inspirante
La première idée qui console, c’est qu’il n’y a rien d’injuste dans la mort. Dans mon cas, la seule différence, c’est le moment où cela arrive, pas le fait que cela arrive. La mort fait partie du processus de vie, tout le monde y passe. En soi, c’est très rassurant. On n’est pas détaché du bateau. Ce n’est pas comme si quelqu’un disait : Toi, tu n’as plus de carte, tu ne peux plus monter." Ce quelqu’un dit simplement : «Ta carte s’épuise, bientôt, elle ne marchera plus. Profites-en maintenant, fais les choses importantes que tu as à faire.»
~David Servan-Schreiber, à propos du cancer qu'il n'aura pas pu vaincre

LECTURES SUGGÉRÉES
~ABIVEN, Maurice (dir.). Pour une mort plus humaine. Expérience d'une unité hospitalière de soins palliatifs. Paris, Masson, 2004, 207 pages.
~KÜBLER-ROSS, Elisabeth. Les derniers instants de la vie. Genève, Labor et Fides, 1975, 279 pages.
~RUSZNIEWSKI, Martine. Face à la maladie grave: patients, familles, soignants. Paris, Dunod, 1995, 206 pages.
~SEBAG-LANOË, Renée. Mourir accompagné. Paris, Desclée de Brouwer, 1986, 296 pages.

Le deuil vécu par les intervenants

Par Soo-Nam Mabille Psychologue clinicien à Palliabru, Bruxelles, Belgique

Le terme de « deuil » fait partie de ces mots dont on se dit qu'ils sont faits pour décrire les histoires des autres. De fait, lorsque le décès d'un proche survient, ce mot « deuil » n'apparait pas immédiatement. Et s'il devait apparaître dans ce moment, ce serait d'une manière probablement incongrue.
C'est d'abord l'ouverture d'un temps : un temps de houle et de chavirement, durant lequel on tangue et on se sent saisi par le vertige de la disparition. Boule de tristesse mêlée de souvenirs parfois même d'une certaine mélancolie. Brusque rappel saisissant du caractère vertigineux de l'existence, au sens de ce qui existe et ce qui n'existera plus, n'existera plus … jamais. Miroir de notre propre finitude oubliée. Ce n'est qu'après cette période, après avoir traversé tout ça que peut, peut-être, émerger alors la question du « deuil » ou tout au moins de ce qu'il reste de toute cette affaire.

Une affaire qui commence par l'apparition de la disparition d'une existence. La disparition, réelle, celle qui vous oblige à penser l'impensable, c'est-à-dire ce quelque chose qui ne parvient pas vraiment à se représenter. Impossibilité d'abord d'en accuser le coup tout à fait. Comme s'il n'y avait pas de partition prévue pour soutenir ces notes-là. C'est un vécu de débordement, de chute dans le vide ou une plongée dans le noir, l'infini. Ça saisit dans le corps. Parfois, ça fait mal.

Est-ce déjà le deuil?

Et puis il y a les heures et les jours qui passent. Les cérémonies : enterrements, traditions, rassemblement des gens constituent habituellement la manière dont le lien social vient entourer l'événement. Est-ce de pouvoir marquer la disparition par des paroles et des gestes qui remobilisent déjà vers le vivant ? Ou peut-être est-ce plutôt déjà permettre de distraire l'attention de ce qui tétanise, arrête, sidère.
Les intervenants en soins palliatifs ne connaissent pas cette partie plus traditionnelle, habituellement. Pour les psychologues de Palliabru, leur place s'inscrit dans un travail d'accompagnement de la parole. Une séparation est d'emblée marquée avec le champ de la famille ou celui constitué par les proches.

Au moment du décès du patient, là où nous étions amenés à l'approcher dans une forme d'intimité originale, étant à la fois souvent très proches du vivant de sa parole et à la fois si éloignés de sa vie réelle, tout à coup, nous sommes coupés de nos visites par l'arrêt du suivi ou par l'arrêt de la vie. Nous sommes brusquement arrêtés dans cette suite de rencontres qui a pu parfois construire un fl ténu sur plusieurs mois.

Au moment de l'annonce du décès, il y a en général un petit temps, un instant de vacillement, d'arrêt brusque du courant quotidien de la vie. Dans le moment où on apprend l'annonce du décès du patient, il y a souvent un temps rapide de repli en soi-même. Moment où il faut se retirer un peu du monde pour penser ce qui se passe là. Moment de fixation, d'embarras. Interloqué. Moment de silence, sans voix. Il faut du silence intérieur pour faire place à la pensée. Et puis le travail se poursuit. Il n'est cependant pas rare que les quelques traits marquants de certains de ces patients nous soient rappelés au cours de discussions avec les collègues concernant d'autres patients ou au cours de nos discussions sur les difficultés de suivis. Certains traits marquants ou certaines paroles étonnantes se rappellent comme autant de petites traces laissées par eux dans nos parcours aux multiples prises en charge.

Il y a, malgré tout, une certaine étrangeté qui frappe ce vécu particulier, ces souvenirs de conversations et moments passés avec les patients disparus : avoir été témoin, souvent ultime, d'une vie en train de disparaître.

Source: Kairos n°65